jeudi, décembre 14, 2006

Aux lecteurs qui souhaiteraient s'y aventurer, une brève mise en garde : Un non-dit dit non-lu reste un dit non-dit.

Je n’ai pas peur de l’inconnu. Je n’ai pas peur de lui. C’est moi. Je me fais peur. L’Hilda aux sept cœurs qui sévit en moi. Son passé… auquel je ne souhaite pas d’avenir. J’aimerais pouvoir dire que ça m’en exploserait au moins six, des cœurs, mais je sais que c’est faux, une impression passagère qu’ils donnent. Je sais qu’ils sont increvables. Et moi aussi. Je sais qu’une fin n’est jamais qu’un autre commencement…

Hilda me gouverne, je n’ai pas d’arme contre elle. Elle ne sommeille jamais. Jamais. Elle est fatigante, elle aussi... Un genre de vierge perpétuelle renaissant chaque fois plus brûlante de ses cendres. Elle ne carbure qu’aux histoires et aux écrits.

Là… vraiment… j’ai trop d’autres choses à faire pour redéployer l’immense quantité d’énergie qu’elle peut bouffer. Elle est con, Hilda… Elle me cause beaucoup de peines… Et puis elle me fait passer pour la plus grosse bonne poire qui ait jamais traîné sur Terre… Ca chiffonne un rien…

Ca a commencé avec Le Champion De Basket en CM2. Deux ans de rêvasseries et au bout, rien. Et puis il y a eu toute une chaîne…

Il y a eu Le Hard Rocker Des Villages Paumés en 5ème. Un an et demi d’histoires et puis rien.

Il y a eu Le Beau Laid en 2nde. Deux ans. Puis rien. Juste un premier baiser raté. Deux lettres de sa main lorsque je suis venue vivre en France. Perdues. Des cargaisons de la main d’Hilda. Envoyées. Jetées. Perdues.

Il y a eu Le Chevelu en Terminale. Un an, et puis rien. Quelques lettres échangées bien que nous nous voyions et appelions chaque jour. Que j’ai brûlées.

Il y a eu Le Coq, dernière année de fac. Premier à décider une relation écrite sans m’en avertir. Il a toujours su lui, qu’on ne se verra jamais, que c’était juste pour le rêve, qu’il avait vingt ans de plus que je n’en savais, qu’il n’habitait pas Toulon, qu’il n’était pas plongeur, qu’il était tétraplégique. Moi, je l’ai su des années après m'être déchiquetée les espoirs.

Il y a eu Le Rataire. Un suicidaire en série. Une émotion si intense, que j’en ai pondu mes premières chansons… Les yeux peints de l’âme, j’ai bobo à ma larme… Conneries. Jetées au vent. Puis rien. Une trace légère. Un butin de guerre. Ma guitare. Que j'aime à sa place. Qui a une histoire. Qui fut sienne. Qui me ressemble. Dont, même réparée, il n'a pas voulu.

Et il y a eu Bogus. Marié, deux gosses. Je l’ai tout de suite su. Un impossible pour toujours, à jamais. Mais Hilda n’a rien voulu entendre. Bogus racontait des histoires… Bogus m’emmenait faire des voyages imaginaires tous les soirs… Hilda aurait eu besoin de dix-sept cœurs rien que pour aimer Bogus. Elle se fichait royalement de ceux, palpables, disponibles, présents. Hautaine comme un empereur russe. Trois ou quatre ans de Bogus, et puis rien. Une seule fois, Hilda a eu un seul geste sur son invitation. Elle lui a coiffé les cheveux en queue de cheval. Un geste dont elle a profité. J'peux témoigner. Une fois, ivre, il m'a serrée dans ses bras pour dire au revoir. Je suis seule à m'en souvenir. Il a laissé ses mains sur mes hanches. Un temps. Rien entendu à ce qu'il disait. Et voilà. Rien. Comme dans les romans à la con. Ceux qui font croire aux happy ends. Jamais un end ne sera happy.

Sept histoires pour sept personnages. Sept amours pour sept cœurs. Ma coupe est raisonnablement pleine. Je n’en veux plus. Je sais comment ça commence. Je sais comment ça fini. Seul le développement réserve des surprises. Hilda s’en régalerait…

Je n’ai pas peur de lui. Je n’ai pas peur de l’inconnu. J’ai peur que ça ne recommence. Hilda le lorgne depuis sa troisième réplique.

« J’ai eu un joli professeur de français… »

Je lorgne Hilda depuis qu’elle ouvre l’œil.

« Tais-toi ! Pas toucher ! Couchée, Mémère ! »

Elle se contente de sourire. Garce. Et je vois bien. Tout est là pour que ça commence. La boulimie d’écrire. Les mines de rien. Le trop plein de présence écrite. Le trop vide de présence palpable. Entrecoupés de silences mystérieux, rois des aiguiseurs de désirs. Nappés de l’incapacité à me fâcher quand n’importe quel humain piquerait une saine colère.

Entre lui et moi, une importance ouvre des possibles. Ensemble, nous pourrions imaginer et peut être même réaliser des projets éclatants. Nous pourrions nous offrir une saprée balade sur le chemin des Passeurs… Si Hilda s’en mêlait, ce serait fichu. Ca finirait. Sur un rien. Un gros rien du tout. Sans laisser de trace. Il n’en resterait que ma peine. Et ma solitude. Elle s’y loverait. Ce serait sa nouvelle chrysalide. Elle l'éclaterait en renaissant.

Ô Neptune… Dieux des vagues à l’âme de fond qui font le ram-dam des entrailles et les feux de paille… Sept fois, tu as refusé… Cette fois, protège-moi…

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